De nombreux visiteurs étrangers sont surpris de voir un certain niveau de vie à Dakar. Ces personnes, qui ne sont pas à blâmer vue l'image qu'on ne cesse de donner de l'Afrique dans les médias, s'attendent à leur arrivée à l'aéroport de Yoff à voir des cases africaines en plein centre de Dakar ! Il faut bien faire la nuance entre la pauvreté d'un pays, et la pauvreté de ses habitants. Le Sénégal est en effet un pays pauvre bien qu'il soit plus riche que quatre de ses cinq frontaliers. C'est donc la puissance économique et militaire régionale. Cela permet au moins aux Dakarois d'avoir un niveau de vie que beaucoup d'Africains envient. La télévision couleur est ainsi entrée dans la majeure partie des foyers dakarois. Et la solidarité sénégalaise fait que adultes et enfants n'ayant pas de télévision y ont néanmoins accès grâce à un parent ou voisin. Ainsi personne ne rate le combat de lutte dominicale ou le match France-Espagne ! Cette solidarité se manifeste également par le partage des décodeurs Canal Horizons et des antennes permettant de capter TV5 , RFI , MCM , MTV, etc... L'électricité est également généralisée puisque 98% des foyers Dakarois ont du courant chez eux. Là encore les «arrangements» y sont pour quelquechose puisqu'un même compteur, et donc un même abonnement, profite souvent à plusieurs familles. Paradoxalement l'eau est présente dans beaucoup moins de foyers que l'électricité. Mais c'est aussi un problème de traditions. En effet, l'eau est souvent achetée aux fontaines publiques qui sont un lieu de palabre excellent pour les ménagères (c'est notamment le cas dans les villages lébous de Ngor, Yoff, ou Ouakam mais également dans les quartiers les plus pauvres de Pikine). Dans la banlieue dakaroise de Thiaroye ou Pikine, de nombreuses concessions familiales tirent encore leur eau d'un puit. Photo : un petit talibé (photo de P. Clément)

Le téléphone est également un service rarement présent dans les foyers. Mais les télécentres, véritable phénomène sénégalais fourmillant dans tous les quartiers, remplacent avantageusement les abonnements coûteux de la Sonatel. De plus, le téléphone portable s'étant généralisé, le nombres d'habitants équipés d'un GSM est supérieur à celui des possesseurs d'une ligne fixe.
Ainsi les Dakarois bénéficient d'un niveau de vie enviable en Afrique de l'Ouest. Les infrastructures sont régulièrement entretenues et l'éclairage nocturne est omniprésent. De nombreux nouveaux quartiers ont été bâtis en toute intelligence et leur convivialité n'est pas à critiquer. Tel est le cas de quartiers de classe moyenne comme les S.I.C.A.P. Liberté, Sacré-Coeur, Amitié ou Baobab, de quartiers populaires tels que les Parcelles Assainies, les H.L.M., Patte d'Oie, ou Bop et des quartiers réservés aux nantis comme Point E, Fann, Hann-plage, les Almadies, ou Mermoz.

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Cependant, même si les bidonvilles du type «favelas» brésiliennes n'existent pas, de nombreux quartiers populaires ont connu une expansion anarchique et la construction sauvage fait qu'il est difficile d'y vivre ou plus simplement d'agrandir son logement. Dans ces quartiers démunis, il n'est pas rare de voir dix personnes ou plus dormir dans la même pièce. C'est le cas du groupe Pikine-Guédiawaye-Thiaroye, sans contexte le plus difficile à vivre du pays. Si la misère existe au Sénégal, ce n'est pas dans les zones rurales mais bel et bien dans cet ensemble de quartiers à la démographie galopante dont la population a dépassé celle de Dakar il y plus de dix ans. Surpopulation, pauvreté, insalubrité (certains quartiers sont inondés 6 mois sur 12), manque de transports, chômage, épidémies, etc... rendent Pikine explosif : la délinquance y a explosé ces dernières années et l'espoir des jeunes de sortir un jour de cette situation est bien faible. Braquages à mains armée ou viols en réunion, phénomène absent il y a 10 ans peuplent désormais régulièrement les pages "faits divers" des journaux sénégalais.

L'espère des habitants de ces quartiers réside dans la «parcellisation» des terres à l'Est de Dakar. Ceci permettra de dégorger les quartiers pikinois bordant ce secteur Est en créant des nouveaux espaces viabilisés à Malika, Yeumbeul ou Keur Massar. Suite aux inondations de 2005, plusieurs plans de relogement ont justement été mis en place dans ces nouvelles terres qui seront accessibles plus facilement grâce à la nouvelle autoroute à péage qui d'ici 2010 arrivera jusqu'au carrefour de Diamnadio (croisement Thiès-Mbour).

Quoi qu'il en soit, qu'ils habitent dans de nouveaux quartiers ou dans les pires, le mot d'ordre des jeunes Sénégalais est «débrouillardise» et beaucoup sont des "xossluman" (démerdeur). Moins d'un Dakarois sur cinquante est employé à plein temps et touche un salaire. Tous font donc de petits boulots occasionnels leur permettant d'aider la famille, de se vêtir et de sortir. En outre, dans les parties traditionnelles de la banlieue lébou (Ouakam, Ngor, Yoff, yarakh) bon nombre d'habitant peuvent avoir une activité tournant autour de la pêche quand ils n'ont rien d'autre à faire. Ngor, Yoff, Yarakh et Bargny sont donc les villages de pêcheurs par excellence. Même les jeunes étudiants peuvent la pratiquer occasionnellement et surtout en période vacances scolaires. L'apprentissage est aussi pour cette immense classe d'âge un moyen de gagner quelques C.F.A. Mais soulignons que cet apprentissage ressemble plus à une exploitation tyrannique. Il s'exerce dans de nombreux domaines mais principalement dans la couture, les transports et la mécanique. L'apprenti n'a aucun statut et sa rémunération est laissée à l'entière appréciation du maître d'apprentissage. Elle dépasse rarement 10000CFA (15€) par mois. La durée de ces formations est en général de 3 ou 4 ans, mais elle peut être plus longue et aller jusqu'à 8 ans.

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